Management Package
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Janvier 2009 - Repères pour négocier un management package (Reflets ESSEC Magazine - janvier 2009)




L’appel à des managers extérieurs expérimentés ou la promotion de managers déjà en place interviennent désormais dans des contextes très variés : LBO, retrait du dirigeant historique sans changement de contrôle, lancement d’une nouvelle activité, redressement d’une filiale, etc. Les contreparties offertes aux managers dépassent alors le simple cadre du contrat de travail ou du mandat social pour inclure des mécanismes complets d’intéressement au capital, les management packages, dont l’objectif est de garantir « l’hyper-motivation » du manager au cours des 4 à 6 années suivantes.

La conception des management packages est arrivée à un certain stade de maturité et se caractérise désormais par une série de principes relativement standards. La mise en œuvre de ces principes varie toutefois d’un package à l’autre. Nous proposons une revue de certains de ces principes dans le contexte particulier d’un manager (Manager) intervenant dans une entreprise majoritairement détenue par un ou plusieurs fonds d’investissement (Investisseur Financier).

L’Investisseur Financier attend du Manager une implication financière

L’Investisseur Financier souhaite que le Manager investisse à ses côtés, dans la mesure où il s’agit de la meilleure preuve de sa confiance dans le futur de l’entreprise et de sa motivation pour la faire progresser. Il est donc demandé au Manager d’investir de manière significative dans la holding de reprise, souvent une année ou une année et demie de salaire brut. Dans certains cas, le Manager investit jusqu’à deux à trois ans de salaire.

L’Investisseur Financier propose au Manager qui investit de démultiplier son rendement au-delà d’un certain retour sur investissement (en général, au delà d’un TRI Investisseur de 20-25 %), en rétrocédant au Manager une partie de sa plus-value, généralement entre 10 % et 25 % de celle-ci. En schématisant, dans un LBO qui s’est bien déroulé, le Manager peut espérer au travers du mécanisme de rétrocession de plus-value récupérer lors de la revente de l’entreprise aux alentours de dix fois sa mise lorsque l’Investisseur Financier réalisera de son côté un multiple d’investissement compris entre 3 et 4.

Les formules de rétrocession de plus-value pouvant être particulièrement complexes, il est recommandé d’établir des simulations chiffrées avec des hypothèses haute et basse de croissance des performances et de les annexer aux accords à titre d’exemples. En cette période troublée pour la valorisation des entreprises, il est aussi recommandé d’inclure dans ces simulations chiffrées plusieurs hypothèses de multiples de valorisation (généralement basée sur le résultat d’exploitation augmenté des amortissements et dépréciations ou EBITDA).

Le mécanisme de partage de plus-value se déclenche à partir du moment où l’Investisseur Financier franchit à la baisse un seuil de participation (généralement compris entre 33 % et 50 %). Il reste toutefois à déterminer si le partage de valeur au profit du Manager sera réalisé par extrapolation, c’est-à-dire en faisant comme si la valorisation retenue pour l’opération de sortie partielle de l’Investisseur Financier équivalait à une sortie totale, conduisant à un débouclage complet du système d’intéressement du Manager. La question du temps minimum de présence de l’Investisseur Financier dans le capital (lequel permet au Manager de maximiser la valorisation de l’entreprise et partant le mécanisme de rétrocession de valeur) constitue souvent un point dur de la discussion car l’Investisseur entend demeurer maître de son agenda de sortie.

Les projets de croissance externe amènent à discuter de mécanismes anti-dilution

Si la valorisation de l’entreprise augmente de manière progressive avec la croissance organique et le remboursement de la dette contractée par la holding de reprise, cette valorisation est accélérée plus encore au travers d’opérations de croissance externe. Celles-ci nécessitent souvent un réinvestissement de la part de l’Investisseur Financier, lequel peut conduire à la dilution du Manager dans le capital alors même que ce dernier est souvent à l’origine du projet de croissance externe. Bien que sa dilution n’est pas automatiquement synonyme de perte de valeur pour le Manager, celle-ci peut néanmoins le dissuader inutilement d’explorer ce mode de croissance. Il convient alors d’envisager des mécanismes anti-dilution pour le Manager allant d’une faculté à « suivre » systématiquement l’augmentation de capital au prorata de sa participation à un engagement de l’Investisseur Financier de préserver d’une part la participation du Manager et d’autre part le mécanisme de rétrocession de valeur, éventuellement sans réinvestissement exigé de la part du Manager.

En matière de dilution, le Manager se doit également d’examiner attentivement les caractéristiques des titres souscrits par l’Investisseur dans le capital de la holding de reprise (en plus des actions, l’Investisseur Financier souscrit usuellement des obligations convertibles en actions) pour vérifier qu’ils respectent bien la répartition du capital convenue en situation normale (c’est-à-dire hors cas de violation des accords par le Manager, de détresse financière, etc., cas dans lesquels la faculté de conversion des obligations est généralement ouverte).

Les circonstances du départ du Manager influent sur la valorisation de sa participation

Les cas de départ de l’entreprise du Manager avant la sortie du capital de l’Investisseur Financier et leur conséquence sur la valorisation de la participation de ce dernier sont systématiquement envisagées. Il est souvent distingué trois cas :

  • Cas 1 - le départ involontaire (décès, invalidité, etc.) : ce cas de départ n’étant imputable ni au Manager, ni à l’Investisseur Financier, il est souvent prévu le rachat de la participation du manager à sa valeur de marché déterminée par expert ou formule
  • Cas 2 - le départ « sans faute » du Manager : il correspond au souhait de l’Investisseur Financier de se séparer du Manager en général en raison d’un manque de performances de l’entreprise et sans pour autant que l’Investisseur puisse lui reprocher une faute identifiée ; le prix de rachat de la participation du Manager est souvent fonction de la durée de présence du Manager depuis l’entrée au capital de l’Investisseur Financier
  • Cas 3 - le départ « fautif » du Manager : démission du Manager en violation de son engagement de stabilité, violation de sa clause de non-concurrence, violation des accords avec les fonds, faute lourde ; dans ce cas, le prix de rachat de la participation du manager est fréquemment le moyen de sanctionner son départ fautif au moyen de décotes variables d’une situation à une autre.
Les conditions d’emploi du Manager font partie intégrante du management package

L’intéressement du Manager au capital ne doit faire oublier la discussion sur ses conditions d’emploi, que ce soit dans le cadre d’un contrat de travail ou, comme c’est plus fréquemment le cas, en qualité de mandataire social :
• rémunération fixe et modalités de sa révision
• rémunération variable et modalités de fixation
• avantages en nature (véhicules, outils nomades, etc.)
• durée et rémunération de la clause de non-concurrence
• garantie d’emploi
• indemnités contractuelles de départ

En conclusion, les questions à se poser avant d’entamer la discussion d’un management package

En conclusion, les management packages sont structurés par des principes relativement récurrents. Toutefois, les enjeux, les attentes des parties et les rapports de force sont différents d’une situation à une autre et nécessitent une bonne préparation : « quelle confiance dans le projet et les autres actionnaires? » « quels objectifs ? », « quelles priorités (financières, professionnelles) ? », « quelle implication financière et personnelle ?» sont les questions devant précéder toute bonne négociation d’un management package.

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